le débarquement du 15 août 1944 prés du Maubois
Le 6 juin 1944 les alliés débarquent en Normandie et commencent la libération de la France, en parallèle un autre débarquement va être effectué que l’on a tendance à passer un peu sous silence dans le sud de la France et que l’on connait sous le nom d’Opération « Anvil Dragoon ».
Le sud de la France a eu pendant la guerre un destin un peu différent du reste de l’hexagone. En effet, après la défaite française les allemands coupèrent la France en deux zones, une zone occupée dans le nord et le long de la façade atlantique et une zone libre dans le sud. La zone restera libre jusqu’au 11 novembre 1942 date à laquelle l’Allemagne envahit le sud de la France en réaction au débarquement allié en Afrique du nord
Toutefois l’occupation allemande est épargnée au Var, ce sont les Italiens qui vont occuper la région jusqu’en septembre 1943. À cette date l’armée italienne capitule, les alliés ayant débarqué en Italie, les Italiens sont remplacés par l’armée allemande.
Madame Martel qui a hérité de la maison du Maubois le 15 décembre 1938 à la suite de la mort de son mari se trouve dans une situation difficile au moment de l’occupation de la zone sud, les communications étant soumises à des contrôles contraignants. Elle décide donc de vendre la maison de la pointe Maubois. L’acte est passé le 22 avril 1943, l’acheteur est un certain Kaufmann. Il ne jouira que très peu de temps de son achat, 3 mois, puisque sa maison est réquisitionnée totalement par les armées allemandes le 29 juillet 1943.
La maison est occupée par l’armée allemande et selon la carte Bigot du secteur, réalisée à partir de photos aériennes et de renseignements sur place, il existe trois « machine gun » et 2 « pillbox », la maison et la réserve d’eau, ils creusent également des tranchées pour pouvoir circuler en toute tranquillité à l’abri d’éventuelles tirs venant de la mer.
Les unités allemandes basées à la pointe Maubois étaient composées de « volontaires » Russes l’Ost Bataillon 661.
La zone occupée reste relativement calme pour les soldats italiens puis allemands, mais au fur et à mesure où le mois d’août 1944 se rapproche les raids se font de plus en plus fréquents, les cibles favorites étant en général les gares ferroviaires de Nice, Cannes ou le pont de la rivière du Var et surtout celui d’Anthéor. L’objectif d’Anthéor était majeur il s’agissait de couper les lignes de chemin de fer qui fournissaient le ravitaillement. Le pont a donc été bombardé à de nombreuses reprises.
il semble, selon les rapports qu’il ait été détruit par un tir sur une pile de pont issu du Brooklyn entre 7h10 et 7h59 le 15 Août 1944 apres 414 tirs sur la zone.
Si le Sudwall ne bénéficie pas de la même puissance que celui de l’Atlantique il n’en demeure pas moins que la côte présente une ligne quasi continue d’ouvrages bétonnés, de positions fortifiées, complétés par des obstacles passifs et des champs de mines très nombreux.
La zone prévue pour le débarquement s’étend sur un vaste front allant de Hyères jusqu’à Théoule, avec deux points forts au Dramont et au Viaduc d’Anthéor. Les effectifs sont conséquents, on compte 50.000 soldats, 500 chars, 1161 pièces d’artillerie, 2000 avions et 2250 navires.
Même si elle n’est pas sur un point stratégique, puisqu’elle est située hors zone de débarquement des troupes, la topographie locale n’étant pas favorable, la maison de la pointe Maubois reste toutefois une cible potentielle, le jour du débarquement elle est répertoriée dans les rapports comme objectif secondaire en cas d’obstruction aérienne de la première cible.
D’avril 1944 au mois d’août les alliés préparent le terrain en bombardant les installations allemandes. Jusque-là la maison d’Alfred E Martel au Maubois est relativement épargnée au niveau de l’intégrité de ses murs. Pourtant à J-1h avant le débarquement 140 bombardiers arrosent le secteur prévu pour l’arrivée des troupes, une attaque suivit par une réplique des 400 canons lourds de la flotte. C’est la Camel force qui traite le secteur, elle est composée de 29 820 hommes et 3 597 véhicules avec la 36th US Infantry Division « Texas » de John E. Dahlquist, appuyée par le Combat Command Sudre de la 1re DB Française. Cette dernière commandée par le Colonel Aimé Sudre comprend le 2e Régiment de Cuirassiers, le 3e Bataillon de Zouaves Portés, le 1er Escadron du 9e Régiment de Chasseurs d’Afrique et le 1er Groupe du 68e Régiment d’Artillerie d’Afrique.
La Camel Force est couverte par la Task Force 87 du Rear-Admiral Morton L. Deyo (qui a commandé l’appui du débarquement d’Utah Beach) avec le cuirassé USS « Arkansas », le croiseur lourd USS « Tuscaloosa », ainsi que les croiseurs légers USS « Brooklyn» et « Marblehead », HMS « Argonaut », « Emile Bertin » et « Duguay-Trouin ».
Le débarquement va être fatal à la maison du Maubois, dès 7h50 les 30 000 tubes des bâtiments lance fusées couvrent la côte d’une nappe de feu. Après le débarquement, les navires de guerre sont aussi engagés pour bombarder les résistances allemandes et assurer un accès sûr en contrôlant les sites près des plages. C’est très vraisemblablement un tir venu de la mer qui a causé des dégâts au bâtiment.
Dans le rapport de l’USS Mc Lanahan (DD615) il signale avoir ouvert le feu sur 4 camions allemands stationnés sur la route entre le Cap Roux et la pointe Maubois et cessé le tir à 10h53 en notant cible atteinte, il rouvre le feu à 10h55 sur un canon camouflé situé sur la pointe Maubois et à 12h26, toujours sur la même cible, sur un abri camouflé directement en dessous.
Les vues aériennes avant le jour J et après montrent un très grand nombre d’impacts sur le relief à l’arrière de la maison d’E.A Martel, ce qui est la preuve d’un tir tendu si l’on tient compte de la position du navire au moment des tirs.
La maison fera après la guerre l’objet d’une demande de dommages de guerre, malheureusement leur paiement sera très tardif, seulement en 1957 la valeur n’était plus du tout la même qu’en 1945. Donc de nouveaux plans remplaceront ceux de 1945 établis là encore par l’architecte Albert Marquisan sur la demande du nouveau propriétaire , il ne modifieront pas la structure de la maison mais uniquement la toiture légèrement surélevée et des arches en pierre de l Estérel et un balcon. Nous n’avons pas retrouvé aux archives le descriptif des dégâts, les archives des dommages de guerre étant tellement importants que les archivistes ont du faire des choix dans la conservation et ne conserver que quelques exemples. le dossier 20878 Z étant perdu difficile d’estimer les dégâts sur la maison toujours est-il qu’une somme de 915 000 francs était demandée, elle sera obtenue en 1957 le coût des travaux lui s’élèvera a 2 100 000 fr.
Compte tenu de l’érosion monétaire due à l’inflation, le pouvoir d’achat de 2 100 000,00 Anciens francs en 1957 est donc le même que celui de 43 368,64 Euros en 2018.
les photos aériennes de l’époque montre un toit intact il semble que seule la façade sud / sud-est ait été touchée, selon correspond bien avec les modifications entreprises sur cette maison sur cette zone uniquement.